vendredi 16 janvier 2009

The problem with NoLife (et un peu Youtube, aussi)

Dans l'esprit du légendaire The problem with wikipedia de XKCD (quoi, vous n'avez toujours pas lu XKCD ? Mais je sers à quoi ?), voici le récit d'un cheminement intellectuel franchement douteux permis conjointement par la plus geekienne des chaînes de télé, et le plus télévisuel des sites de geek.

Un jour, dans votre vie, il vous arrivera peut-être d'être déprimé, pour une raison ou pour une blonde. Et aussi, d'être en vacantes. Et imaginons, d'avoir une FreeBox et donc plein de temps libre devant vous (ça commence à faire des hypothèses, je sais). Il n'est pas exclu que vous finissiez par passer vos journée en caleçon et robe de chambre devant la chaîne NoLife (bon la robe de chambre, c'est juste pour le cliché, faut pas pousser non plus.) NoLife est une petite chaîne faîte avec le coeur et trois bouts de ficelles par des jeunes gens forts sympathique qui ont juste passé trop de leur mercredi après midi à jouer à Super Mario en apprenant le japonais.

Quand NoLife parle de jeux vidéos, elle a le droit d'en dire du mal (même si c'est des gros jeux). Quand NoLife parle de cinéma, de culture, de cuisine même, c'est pas tout à fait la même chose que sur le reste du PAF (dans ta gueule). Maintenant, allez savoir pourquoi, quand il y a des écrans de pubs sur NoLife, il y a juste un spot, et c'est pour le DVD de la série Nerds.

Donc, supposons que vous vous retrouviez à regarder NoLife, et bien il n'est pas exclu que vous tombiez un jour sur de la grosse J-Pop qui tache (à savoir des groupes de midinettes jaunes fluos qui hurlent des remix du vieux tubes de disco européennes avec des chorégraphies dignes de bioman et plus de retouche photoshop quand dans un numéro spécial de Paris Match entièrement consacré aux vacances d'une rock-star ou d'un président de la République). Et comme ces gens là savent faire leur boulot, vous allez vous retrouver à essayer de vivre une vie productive avec CA dans la tête :



Complètement traumatisé par l'évènement, vous allez finir sur youtube pour essayer de vous repasser le clip d'en l'espoir fou de vous l'enlever des méninges (et dans le pire des cas, de mater de la post-puberte asiatique pour peu que soyez branchés sur le hentai). Et là, Youtube va faire son office, et vous raconter qu'en fait, les gamines ont honteusement repris un morceaux d'une groupe de disco. Est-européen. Ayant représenté l'Allemagne au concours de l'eurovision. En 79. Avec à peu près le même morceau, et une chorégraphie encore plus surréaliste (si si, c'est possible) :



Normalement, à ce moment de votre vie, vous aurez à nouveaux envie de sortir de chez vous, de rencontrer des vrais gens, de fonder votre entreprise, une famille, d'aller sur Mars, bref, n'importe quoi pour ne plus être obligé de traiter en même temps deux informations aussi contradictoire que la chanson populaire du soleil levant et la musique électronique d'outre-bavière.

Et là, pas de bol, six mois plus tard, vous rallumerez NoLife. Et vous apprendrez qu'entre temps, le clip sus-évoqué (celui des nanas en jaunes, hein, attention) est arrivé en haut d'un genre de top 50 thématique, et que suite à un pari stupide, l'équipe de la chaîne de télé se retrouve à refaire le clip avec encore moins de moyen, et encore plus de jaune :



Le monde moderne s'est abattu sur vous. Il ne vous reste plus qu'à aller apprendre le japonais pour frimer dans les conventions de cosplay, et poster les vidéos sur youtube.

Moi, je vais réviser mon teuton :


Moralité :
Get a life. Get a girlfriend

mardi 13 janvier 2009

The last keynote

6 Janvier 2003. 18h00.

Phil Shiller s'avance sur la scène. La boule dans la gorge lui rappelle un peu son safari en Afrique, avec l'impression que la bande de lions devant lui va vraiment le manger tout cru.

"Mais pourquoi j'ai accepté ça ? Pourquoi on n'a pas envoyé Steve, encore une fois ?"

Steve. Ne pas trop penser à lui. "Le laisser faire ça, franchement...", soupire-t'il. "Aucune morale, au board. Mériteraient tous d'avoir placé leur économies chez Madoff, tiens"

"Mes chers, amis, bienvenue à la keynote de cette conférence..."

(Merde, ils lui avaient dit de commencer par une blague, mais pas envie)

"Vous avez tous suivi les événements concernant la santé de notre CEO, Steve Jobs..."

(rumeurs dans la salle)


"... notre dirigeant qui a tenu à s'expliquer lui-même sur son état de santé dans une lettre ouverte. Écoutons son message :"


(La salle s'éteint, et les hauts parleurs crachent les paroles du 'maître' avec des relents de télé-évangelisme de banlieue, et un silence de réunion plénière au Sénat)

"... after further testing, my doctors think they have found the cause : ..."

(Phil a honte. Bon, personne n'a remarqué...)

"... a hormone imbalance that has been "robbing" me ... "

("Et merde". Phil en est sûr : il a entendu quelqu'un chuchoter dans la salle. "Hey, isn't that Noah Wyle's voice?". Bon. Tans pis. Ils auraient du faire comme pour Jean Paul II. Si seulement Steve pouvait encore articuler...)

"... of the proteins my body needs to be healthy. Sophisticated blood tests have confirmed this diagnosis."


Phil reprends. "Comme vous l'imaginez, nous avons tous été aux anges lorsque nous avons découvert que le problème de Steve était identifié. Mais c'est là que Steve nous a étonné -- comme nous pensions qu'ils ne nous étonnerait plus jamais."

(Allez, juste réciter le texte comme prévu, et après c'est fini)

"Steve a réfléchi, s'est levé et nous a dit : 'les mecs, ce qui m'arrive est un don du Ciel. On ne peut pas laisser passer un truc pareil. Toute ma vie je n'ai pensé qu'à la beauté, avec un grand B. On ne faisait pas des produits, on faisait du Beau. On modelait. On travaillait la matière pour enlever les couches inutiles, jusqu'à arriver au Beau.'"

("ah oui, la citation...")

"Steve a continué : 'St-Exupery disait : 'la perfection ce n'est pas quand il n'y a plus rien à ajouter, mais quand il n'y a plus rien à enlever'. Avec ce qu'il y a dans mon corps, nous allons amener la perfection là où elle était étrangère. Avec ce qu'il y a en moi, nous allons pouvoir modeler le dernier objet qui résistait à Dieu et aux artistes : The Human Body !!'"

(La salle oscille entre la surprise, et l'incrédulité. Seules quelques personnes ont déjà compris. Elles n'oscillent plus : elles ont déjà métaphoriquement le cul par terre. "Could he really do this ?")

"Et après, il s'est tourné vers nous, et dis : 'et si vous ne le faites pas, je laisserais Sergey & Larry essayer. Ca sera mon cadeau d'Adieu'".

("Oh f***. Yes, he can")

"So, Ladies & Gentleman, je suis fier de vous annoncer le dernier né des produits de chez Apple, une évolution technologique majeure, qui je l'espère tracera encore plus profonde la marque de Steve Jobs sur l'histoire de ce pays : ..."

(...roulement de tambours...)

"... introducing ..."

Sur l'écran géant, l'immensité blanche copyrightée, et au milieu du tableau immaculé, une fiole au reflets rouge pastels.

"... the iDiet !!!"

Hurlements de la foule en délire.

Phil n'a plus qu'à passer les slides et bafouiller ses explications techniques. "...50ml du sang du fondateur d'Apple, Steve Jobs..."

(Steve. Ne pas penser à Steve)

"..., traités pour vous inoculer les même spécificités hormonales pendant toute une semaine..."

(C'est un gars du marketing qui a trouvé le terme 'spécificités hormonales'. Un ancien de chez Pfizzer. Pour faire "moins peur", il disait. Rien de tel que des pharmaciens pour vous vendre à prix d'or une maladie mortelle)

"Quand aux effets, quoi de mieux qu'une image pour vous montrer le résultat ? "

(La honte revient. "J'aurais vraiment du reprendre un rail de coke avant de commencer")

"Avant / Après !!"



CNN interrompt ces programmes.

Le cours de l'action Apple remonte de 278% en dix minutes.

Dans sa chambre, Steve Jobs entends seulement un bourdonnement venu de la télé. A vrai dire ça fait quelque jours qu'il flotte un peu trop. Dans ses neurones de calculateur, il commence à douter. Peut-être qu'il aurait du mettre moins dans chaque fiole. Ou alors en tirer un peu moins d'un coup. Il tient moins bien le choc que prévu, et la perfusion lui fait horriblement mal. Encore de quoi faire un flacon, et il demandera à faire une pause. Allez, deux flacons.

Quelques instants plus tard, le génie de la Silicon Valley choppe une septicémie foudroyante, à cause d'une aiguille mal nettoyée. Système de santé de merde.

CNN interrompt ces programmes.

Le cours de l'action Apple chute de 28798786541% en cinq minutes.

Steve Wozniak à l'air d'un petit garçon perdu alors qu'il prononce l'oraison funèbre de son vieil ami. Lisa retient ses larmes. Bill Gates dit quelques mots pour calmer la presse. "La retraite plus ça, ça fait beaucoup d'un coup. Je suis peut-être le prochain." Humour d'ingénieur.

En nettoyant le bureau du CEO d'Apple, Fernando Mendoza ramasse un vieux bandana rouge et un disque de folk des années 70. Par un jeu de circonstances peu explicable, le bandana contient l'unique souche d'une étrange bactérie multimillénairement oubliée. Ses effets sur l'homo sapiens sont assez amusants : dans la plupart des cas, bien dosée, elle traite plusieurs formes d'une douzaine de maladies populairement tenues pour incurables. Curieusement, en présence de vinyle, de marijuana et de plastique blanc, elle entraîne de vilains dérèglements hormonaux, des pertes de poids carabinées, et une névrose psychotique obsessionnelle conduisant à un souci démesuré du détail.

Le technicien de surface balance tout ça à la poubelle. Maintenant, il ne risque plus de se faire engueuler par l'autre maboul de patron.

Britney Spears ressort un album.

CNN interrompt ces programmes.